Une coopération internationale au ralenti…
A l’annonce des premières livraisons de vaccin en décembre 2020, les pays riches, États-Unis en tête, ont sorti le carnet de chèques pour retrouver une vie normale au plus vite. Bien vite le décalage d’approvisionnement entre continents s’est fait sentir et le programme “Covax” de l’OMS, censé répartir équitablement les doses dans plus de 200 pays, n’a que peu changé la donne. Les pays censés envoyer des vaccins sont encore loin de tenir leurs promesses : seulement 200 millions de doses envoyées, sur 1,4 milliard de prévues en 2021 (chiffres au 1er octobre 2021).
Le contraste entre pays riches et en développement reste encore largement visible aujourd’hui, avec une population européenne vaccinée à 68 %, contre seulement 8 % en Afrique (moyenne mondiale : 49 %, chiffres au 25 octobre 2021).
Avant l’été 2021, l’ONU a lancé un objectif à l’Afrique : vacciner 10 % de sa population, en priorité les plus fragiles, avant la fin septembre. Résultat : seuls 12 pays sur 54 ont atteint cette ambition. Avec comme toujours, de grandes disparités : le Maroc plafonne à 63 %, l’Afrique du Sud à seulement 25 %, alors que la grande majorité des pays restants n’atteint même pas une vaccination à deux chiffres : Kenya 6,5 %, Congo 5,1 %, Éthiopie 2,8 %, Nigeria 2,6 %
… couplée à une faible offre de soins
Comment expliquer ces retards pris dans la vaccination contre le Covid-19 ? Outre les problèmes liés à la volonté politique et l’action internationale, la méfiance envers les pouvoirs politiques et l’hésitation à recevoir un vaccin ont un rôle à jouer, comme montré par une étude internationale. Mais c’est surtout la faiblesse de l’offre de soins en Afrique qui ne permet pas d’accélérer la vaccination des plus fragiles et des enfants.
D’une part les infrastructures manquent, surtout dans les zones rurales. Si le centre de test ou de vaccination le plus proche se situe à plusieurs dizaines de kilomètres, les Africains seront moins enclins à réaliser ces actions, même s’ils sont fortement incités à le faire par leur gouvernement et autres institutions internationales. La relance économique post-Covid en Afrique doit passer par une refonte globale du système de santé, qui devra garantir une proximité dans l’accès au soin au 1,2 milliards d’habitants ainsi que des équipements adaptés. Les hôpitaux en dur sont bien adaptés aux grandes villes qui ont des besoins constants en matière de soins. Pour rapprocher la médecine des populations rurales, des structures médicales modulaires, déplaçables à volonté, semblent mieux répondre à leur problème d’éloignement géographique. La pandémie a notamment mis les autres vaccinations infantiles au second plan, avec des retards importants notamment pour la rougeole, la polio ou encore la fièvre jaune : dans le futur, l’Afrique devra être capable de combattre sur plusieurs fronts à la fois et d’intervenir partout dans tous ses territoires.
D’autre part, la chaîne du froid imposée pour conserver les vaccins ne facilite pas leur approvisionnement jusqu’à la population reculée. Les vaccins Covid-19, une fois sortis de la congélation, peuvent maintenant être conservés durant 30 jours dans un réfrigérateur (2-8 °C). Ce délai n’était que de 5 jours jusqu’en mai 2021. Ce progrès devrait permettre une meilleure distribution des doses sur le continent, si et seulement si la logistique est à la hauteur des attentes. Connaître l’état vaccinal de chaque patient, suivre l’évolution de la population vaccinée, informer les plus fragiles même en dehors des villes… Autant de défis auxquels l’Afrique aura le devoir de répondre, si elle souhaite se relancer économiquement et poursuivre sa croissance.